Si tu suis un peu l’actualité du vélo, t’as remarqué qu’on est inondés depuis quelques mois de signaux inquiétants: les rumeurs négatives et les résultats trimestriaux en baisse se multiplient.
Mais au-delà des nouvelles inquiétantes, est-ce que l’industrie du vélo est vraiment en crise?
On va aborder:
- Quels sont les signes du ralentissement?
- Qu’est-ce qui cause ces réactions de paniques?
- Est-ce qu’il y a réellement moins de monde qui font du bike?
- Qu’est-ce que ça veut dire concrètement pour toi comme client?
- Des solutions?
Temps de lecture: 7 minutes
1 – Quels sont les signes de ralentissement?
Il y a en a 3 gros/visibles:
- L’augmentation de l’inventaire en boutique.
Durant la pandémie, le stock rentrait et sortait pratiquement instantanément parce que les manufacturiers n’arrivaient pas à fournir à la demande.
C’est en partie parce qu’il y avait plus de demandes, mais principalement parce que la chaine d’approvisionnement avait pris du retard en Asie suite au différent lock-down.
Maintenant, si tu te présentes en magasin, tu risques de trouver beaucoup plus d’inventaires, particulièrement pour les vélos et accessoires abordables. - L’abondance de rabais.
Suite au rattrapage de la chaine d’approvisionnement, l’offre a rapidement dépassé la demande en 2023. Comme plusieurs boutiques ont été en mode achat sans trop de considération durant les 3 dernières années (toute se vendait), beaucoup se sont ramassés avec du surinventaire à l’automne.
Ça explique la profusion de rabais et l’effet domino qu’on observe dans le marché de l’usagé. - La diminution/disparition de certains programmes de commandites.
Le réflexe de plusieurs dans l’industrie lorsque des vents de face se présentent, c’est de couper les dépenses dont le retour sur investissement est le moins visible/direct.
C’est souvent les programmes de support des équipes professionnelles et d’une grande variété d’influenceurs/experts qui sautent les premiers. Il y a actuellement plusieurs équipes qui ont ou vont annoncer l’arrêt de leurs activités et plusieurs marques mettent fin semi-silencieusement à leur support aux ambassadeurs.
L’ironie étant que les activités marketing devraient normalement s’autofinancer en augmentation du chiffre d’affaires: si c’était rentable dans les dernières années, c’est quand le marché est le plus compétitif que t’en a le plus besoin.
Bref, il y a plusieurs signes qui marquent la fin définitive du marché de fou qu’on a connu depuis 2020.
2 – Qu’est-ce qui cause ces réactions de paniques?
Que ce soit les tentatives un peu désespérées de faire diminuer l’inventaire (rabais) ou les coupes (questionnables) dans le budget marketing, tout porte à croire qu’il y a du monde qui cherche désespérément du change dans les cracs du divan.
Ce qu’il faut comprendre, c’est que l’industrie fonctionne avec une faible capitalisation et roule sur le crédit:
- La boutique achète d’avance son inventaire entre 6 et 9 mois d’avance et verse entre 10 et 20% de la valeur de la facture en dépôt. Les placements sont fait en septembre et les paiements vont être étalés jusqu’en juin l’année suivante.
- Le distributeur lui c’est commis au manufacturier 1 à 2 ans en avance et a versé entre 5 et 10% de sa commande en avance. Le reste doit être financé par la banque le temps que les boutiques finissent par payer leur placement.
Ça peut être des gros montants que le distributeur doit absorber jusqu’à 12 mois, voir plus s’il a sur acheté certains produits. - Le manufacturier commande une production un bon 2-3 ans avant que les vélos arrivent en boutique, doit verser un acompte de départ semblable aux autres et doit aussi financer le restant le temps qu’ils reçoivent le paiement de ses distributeurs.
Ce qu’il faut comprendre, c’est que quand la machine fonctionne à plein régime comme en 2021-2022 et que la situation ralentit sur le terrain, il y a un effet en cascade. La boutique réduit ses commandes, le distributeur essai de réviser ses commandes pour éviter de prendre le slack (donc la charge financière) et le manufacturier la même chose.
Ce qui arrive, c’est qu’à chaque échelle, l’effet est exponentiel parce que les quantités le sont aussi et ça représente rapidement des montants astronomiques inexistants dans les poches des compagnies (ils ont seulement capitalisé 10 à 20% de la production).
C’est un effet amplifié lorsque les acheteurs des boutiques réagissent de façon émotive en voyant le niveau d’inventaire avant les placements de la prochaine saison: ils ont tendance
à réduire dramatiquement leur commande.
Bref, on a eu tendance à être, en tant qu’industrie, trop optimiste sur la durée du boom de la pandémie et maintenant tout le monde essaie de tirer la couverte de son bord pour se débarrasser de la patate chaude qu’est le trop-plein d’inventaire.
3 – Est-ce qu’il y a réellement moins de monde qui font du bike?
Mais une question fondamentale se pose: est-ce que c’est la demande ou l’offre qui cause le problème d’inventaire? Parce que c’est la peur qui, fondamentalement, cause le problème: on assume que les chiffres de vente en 2024 et + vont être dramatiquement plus bas.
Des données que j’ai pu colliger, il y a eu une hausse du monde qui pratique le vélo de montagne d’un bon 25-30% durant la pandémie.
Simplement expliqué: y’a eu un tsunami de demande.
C’est énorme comme croissance. Ça explique aussi pourquoi ont a vu les vieux bikes de début 2010 réapparaître dans le marché usagé.
La question c’est donc: quel % de ce monde-là vont encore pratiquer le vélo de montagne dans les années futures.
Évidemment je suis pas devin, j’ai donc pas la réponse définitive, mais c’est réaliste d’estimer qu’au moins la moitié du nouveau monde qu’on croise dans les trails sont là pour rester.
Ça veut donc dire qu’il y a un bon 10% plus de consommateurs en 2024 qu’il y en avait en 2019. Ça c’est beaucoup de monde, genre vraiment beaucoup.
Bref, l’enjeu, même en considérant une baisse des dépenses de loisirs parce que les taux d’intérêts sont haut, le problème c’est pas la demande. Pourtant, la plupart des boutiques n’ont pas acheté en 2024 des quantités qui reflètent les chiffres de vente de 2019 + 5 à 10%.
4 – Qu’est-ce que ça veut dire, concrètement, pour toi comme client?
Même si, en théorie, les manufacturiers ont retrouvé la capacité de répondre à votre demande en termes de quantité, tu risques fortement de te frapper et des manques d’inventaires.
Le jeu d’évitement du problème d’inventaire que j’ai décrit plus haut motive les boutiques de diminuer at large leurs achats, mais la demande pour certains produits va continuer à être forte tandis que certains segements ont effectivement été gonflé artificiellement par la pandémie.
Par exemple, la demande pour les vélos de milieu de gamme (entre 3 et 5 000$) va rester forte tandis que celle pour le segment entre 7 et 9 000$ va diminuer. Vous avez été plusieurs a acheté des gros bikes pas tant parce que c’était votre besoin, mais parce que c’était ça ou pas avoir de vélo.
L’enjeu c’est que faire ce travail-là, segment par segment, voir produit par produit, demande une forte compétence en statistique et analyse de donnée. J’te le donne en mille: c’est un skillset qui manque cruellement dans notre industrie.
C’est vrai autant des boutiques (les grosses comme les petites) mais aussi des distributeurs et de plusieurs manufacturiers. On est encore une business drivé par des passionnées et, même si c’est pas fondamentalement une mauvaise chose, ça rend les détenteurs d’un BAC en quelque chose math-related rares.
Il va donc y avoir, pendant encore plusieurs années, cet effet de slinckie d’inventaire épuisé, qui mène à des achats en panique en saison alors que les inventaires chez les distributeurs sont bas, qui mène à éventuellement trop d’inventaire alors que la demande est basse (hors saison), pi la roue recommence.
Si j’avais à mettre un 20$, je dirais qu’on a un bon 2-3 ans de cette gamme-là avant que tout le monde retrouve son beat de croisière.
5 – Des solutions?
Il y a de quoi de fondamentalement humain dans ce qu’on vie, c’est essentiellement la même raison qui créer les bouchons de trafic: les comportements individualistes et le manque de vision moyen-long terme rend ça un peu inévitable.
Mais mettons que je m’essaie, il y a 2-3 choses qui pourraient aider:
- Former/engager aux achats des spécialistes des données et des statistiques.
Notre cerveau est fondamentalement poche a estimer des trucs beaucoups plus simples que les achats d’une boutique de vélo. La seule solution c’est de short-cut nos biais systématiques en utilisant les math.
Je suis peut-être un des rares que ça excite fondamentalement, mais il existe une mine d’or en efficience dans les données des entreprises qui dort sans que personne s’en soucie.
Mais concrètement, ça permettrait d’éviter/diminuer l’effet slinckie que j’ai nommé plus haut en normalisant les achats en fonction des données probantes. - Mieux partager l’information/données entre les niveaux.
Les manufacturiers ont une bonne idée du long terme et du big picture tandis que les shops ont de l’information importante du point de vue local, mais ont est pas ben ben bon s’en parler.
Les manufacturiers ont de l’information qui permettent de normaliser l’achat des produits à faible volume (ex: spread des couleurs ou segment de niche avec 1-2 ventes/années) tandis que les shops sont bonnes pour faire passer l’information sur les trends émergeants (type de trail, présence des femmes ou des enfants dans les ventes, etc.).
Tout le monde est gagnant si on se partage l’information. C’est même vrai entre concurrents. - Décentraliser la prise de décision.
Humainement, c’est pas vraiment réaliste de faire des achats éclairés pour plusieurs milliers de produits. Les donnés ont de la valeur pour des produits stables dans un marché stable, mais ça prend des spécialistes dans des segments de niche pour voir venir les changements de trends.
Avoir des employés de plancher qui ont le pouvoir de réduire les quantités d’un produit en perte de vitesse et de le remplacer par un joueur émergeant, c’est critique pour diminuer les excédents d’inventaires.
C’est important de mettre en place des balises, des calculs ou des proportions pour guider leurs choix, mais c’est les mieux placés pour garder l’inventaire cohérent avec ce qui se fait de mieux. - Favoriser un modèle d’achat en saison plus flexible.
Le modèle actuel de placement favorise l’achat en gros (rabais de volume) qui déconnecte la demande de l’offre. Favoriser des achats en saison avec des inventaires au niveau des distributeurs (ou les meilleures données se trouvent) permettrait de réduire l’effet slincky en rapprochant la demande de l’offre.
Ça peut demander un partage différent des marges de profit, mais c’est fondamentalement plus efficient.
Cela étant dit, on a accès à un réseau de sentiers plus grand que jamais et dans un modèle probablement plus durable qu’ailleurs: j’pense qu’on va être pas pire.
Pi à court terme, tu peux acheter ton gear moins cher …
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